La confiance relationnelle pour cultiver les bons liens

 « ‘‘La confiance est la capacité enfantine d’aller vers ce qu’on ne connaît pas comme si on le reconnaissait ’’, écrit joliment Christian Bobin.

La confiance en soi est une question si centrale dans nos existences qu’elle ne peut être l’objet d’une seule discipline. Pour comprendre ses ressorts, il ne faut pas chercher à l’étudier dans un laboratoire mais l’observer dans la vraie vie, la regarder naître et grandir, adopter son rythme et suivre ses mouvements, ses hésitations et ses embardées, courir à ses côtés comme on suit un enfant qui man que de chuter, puis trouve l’équilibre et finalement s’élance. »

Découvrons à travers ces quelques mots de Charles Pépin, philosophe et romancier français, le mystère de la confiance en soi.

PÉPIN, Charles. La Confiance en soi, une philosophie. (2018). Allary Editions. (p. 11-21)

Osons lire dix pages avec Ambassadrice Chasta DOUCHARD 

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La confiance en soi vient d’abord des autres. L’énoncé pourrait sembler paradoxal. Il ne l’est pas. Le nouveau-né humain est infiniment fragile, dépendant. Les premiers mois, il ne peut vivre seul. Le simple fait qu’il survive est la preuve qu’il a été pris en charge par d’autres humains. La confiance en lui est donc d’abord une confiance en eux : la confiance en soi est d’abord une confiance en l’autre.

C’est parce que nous naissons prématurés que nous avons tant besoin des autres. D’après les embryologistes, il faudrait à peu près vingt mois aux cellules de l’embryon pour arriver à maturité.

Aristote l’avait déjà remarqué : nous naissons inachevés. Comme si la nature avait dysfonctionné, n’avait pas terminé son œuvre et nous jetait trop tôt dans l’existence, plus faibles et démunis qu’aucun autre mammifère. Nous naissons sans savoir marcher, et mettrons en moyenne un an à y parvenir, quand le poulain n’a besoin que de quelques heures, ou parfois de quelques minutes, pour commencer à gambader. Et il faudrait avoir confiance en soi ?

Alors, nous compensons cette déficience naturelle par la culture : par la famille, l’entraide, l’éducation. Grâce à notre art de la relation humaine, nous allons parachever le travail que la nature a laissé en plan, et gagner cette confiance que la nature ne nous a pas donnée.

Petit à petit, l’enfant va prendre confiance en lui grâce à ces liens tissés avec les autres, aux soins qui lui sont prodigués, à l’attention dont il est l’objet, à l’amour inconditionnel qu’il reçoit. Le jeune enfant sent que cet amour n’est pas conditionné par ce qu’il entreprend ou réussit : il est aimé pour ce qu’il est et non pour ce qu’il fait. Voilà le socle le plus solide de la confiance qu’il aura plus tard en lui-même. Avoir été aimé et regardé ainsi nous donne une force pour la vie.

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La conquête de la confiance en soi commence donc par cette lutte contre ce que Freud a nommé la détresse infantile. Si l’adolescent est désireux de partir à la découverte du vaste monde, si l’adulte est confiant et réussit à mettre en œuvre ses projets, c’est d’abord parce qu’ils ont eu la chance de trouver, dans les toutes premières années de leur vie, dans ce que Boris Cyrulnik appelle les « inter-actions précoces », cette « sécurité intérieure » dont les psychologues montrent l’importance.

À la différence de l’estime de soi, qui renvoie au jugement que nous portons sur notre valeur, la confiance en soi engage notre rapport à l’action, notre capacité à « y aller » malgré les doutes, à nous risquer dans un monde complexe. Pour trouver ce courage de s’aventurer au dehors, il faut une « sécurité intérieure ».

 Dans son texte magistral sur « le stade du miroir », Jacques Lacan décrit les premiers instants de la conscience de soi de l’enfant. Âgé de quelques mois – entre six et dix-huit en moyenne –, il se reconnaît déjà dans la glace. Mais que se passe-t-il, au juste, la première fois ? L’enfant est dans les bras d’un adulte qui le présente au miroir. À peine croit-il s’y reconnaître qu’il se tourne vers l’adulte et lui adresse des yeux cette question : est-ce moi, est-ce bien moi ? L’adulte lui répond d’un sourire, d’un regard ou de quelques mots. Il le rassure : oui, c’est bien toi. Les implications philosophiques de cette première fois sont immenses : entre moi et moi-même, l’autre est là dès le début. Je n’ai conscience de moi qu’à travers lui. L’enfant ne fait confiance à ce qu’il voit dans le miroir que parce qu’il fait confiance à l’autre. C’est dans les yeux des autres qu’il cherche cette sécurité intérieure ; c’est dans les yeux des autres qu’il se cherche.

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La même expérience a été réalisée avec des macaques, ces singes génétiquement très proches de nous. Elle révèle leur intelligence : très vite, ils vont utiliser le miroir pour observer des parties de leur corps qu’ils ne peuvent pas voir autrement, comme leur dos ou leurs fesses. Mais, face au miroir, ils ne se tournent pas vers les autres macaques présents dans la pièce : ils n’interrogent pas leurs congénères du regard. Les macaques sont certes des animaux sociaux, apprenant beaucoup des autres, mais, pour se développer, ils ne sont pas dépendants comme nous des relations tissées entre eux. Ils ne sont pas autant que nous des êtres de relations. Sans les autres, nous ne pourrions développer notre humanité : sans les autres, nous ne pourrions devenir ce que nous sommes.

Regardez les enfants sauvages, ces enfants abandonnés à la naissance, recueillis par des bêtes (ours, loups, cochons…) auprès desquelles ils grandissent, et qui sont retrouvés des années après. Comme le montre le film de François Truffaut, L’Enfant sauvage, leur absence de relations aux autres humains a bloqué leur développement. Apeurés comme des bêtes traquées, incapables d’apprendre à parler, ils semblent perdus pour l’humanité. Dans le meilleur des cas, avec patience, avec douceur, les professionnels en charge de ces enfants réussissent à tisser quelques fragiles liens avec eux, et leur permettent de réaliser quelques progrès. Mais ils n’atteignent qu’une forme très précaire de confiance en eux, qui disparaîtra à la moindre contrariété. Dans les termes de la psychologie moderne, ces enfants sauvages souffrent d’un manque d’« attachement » à l’humanité. Jeunes, ils n’ont pas été « attachés » à d’autres humains qui les auraient protégés, rassurés, qui leur auraient parlé et les auraient regardés. Privés de la « sécurité intérieure » que donne cet attachement, il leur est désormais impossible de trouver cette confiance minimale grâce à laquelle le monde et les autres pourraient ne pas sembler hostiles.

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D’après des psychiatres comme John Bowlby ou Boris Cyrulnik, si un petit garçon de deux ans est capable de dire bonjour à un inconnu qui entre chez lui, de lui sourire, d’aller le voir pour lui parler ou le toucher, c’eestqu’il a en lui suffisamment de sécurité intérieure pour affronter cette nouveauté. Ses figures d’attachement lui ont donné assez confiance pour que, précisément, il réussisse à s’en éloigner et à s’approcher de l’inconnu.

Une éducation est réussie lorsque les « élèves » n’ont plus besoin de leurs maîtres, lorsqu’ils ont assez confiance en eux pour supporter l’éloignement de ceux ou de celles qui les ont éduqués.

En faisant ces quelques pas vers l’inconnu, le petit garçon commence déjà à prendre son envol. Les autres lui ont donné confiance, c’est à lui désormais de passer à l’action et de s’en montrer digne. Pour prendre son élan, il puise dans l’amour, dans l’attention qu’il reçoit de sa famille, de celles et ceux qui l’élèvent.

 Les premières années sont donc décisives, mais heureusement, nous pouvons à tout âge nouer des relations qui nous donnent confiance. Si nous n’avons pas eu la chance d’être des enfants suffisamment sécurisés par notre environnement affectif, il n’est jamais trop tard pour tisser les liens qui nous manquaient. Mais cela suppose de bien se connaître pour être conscient de ce manque et de la nécessité de le compenser.

Madonna Louise Ciccone est d’abord une enfant timide, manquant de confiance en elle. Elle perd sa mère à l’âge de cinq ans d’un cancer du sein et vit mal le fait que son père ait rapidement d’autres enfants avec sa nouvelle femme. Elle peine à trouver sa place dans cet espace familial. Depuis toute petite, elle pratique le piano et la danse classique, mais avec le sentiment de n’être pas très douée, d’être une laborieuse. C’est seulement à l’adolescence, inscrite par sa belle-mère dans une école catholique de Detroit, qu’elle rencontre Christopher Flynn, un professeur de danse qui va changer sa vie.

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À l’occasion de la préparation du ballet de fin d’année, il lui dit ce qu’on ne lui a jamais dit, en tout cas jamais avec ces mots-là : elle est belle et talentueuse, elle a un charisme fou. Des années plus tard, Madonna a expliqué que ces quelques mots changèrent sa vie.

Avant, elle ne croyait pas en elle. Maintenant, elle se voit danseuse à New York ; elle se sent naître à elle-même. Lors du spectacle de fin d’année, elle surprend tout le monde, son professeur le premier, en dansant avec une énergie incroyable… et à moitié nue ! Madonna est née. Avant Christopher Flynn, elle avait eu d’autres professeurs de piano ou de danse. Ils lui avaient appris bien des choses, des techniques, des méthodes… Mais aucun ne lui avait fait ce cadeau de lui donner confiance.

Je me souviens d’un concert de Madonna, à Nice. Je n’ai pas encore dix-huit ans et je suis fasciné par sa puissance scénique, sa manière de chanter et de danser, sa liberté. Je me souviens de cet écran géant et de son visage en énorme lorsqu’elle chante Like a Prayer. Des gouttes de sueur qui lui tombent dans les yeux. De son regard, de son sourire comme une immense gratitude.

Bien sûr, Madonna est compétente, expérimentée. La femme qui arpente la scène en tous sens a déjà des années de concerts derrière elle. Mais le charisme ne se réduit jamais à la compétence. Il y a quelque chose de plus, qui donne sa grâce à l’être charismatique. Il cherche sa vérité dans les yeux des autres, ne cesse jamais de s’inventer dans la relation. À l’époque, je ne comprenais pas bien ce que je voyais sur cet écran géant.

Aujourd’hui, quand je repense au sourire habité de Madonna, je crois qu’elle retrouvait dans le public, dans les autres, dans leur énergie, peut-être même dans leur amour, cette confiance qu’elle découvrit un jour dans les yeux de son professeur de danse.

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Madonna n’a pas été sécurisée dès la petite enfance, mais elle a trouvé plus tard une compensation. 

Si nous avons eu la chance de connaître, dès les premières années de notre vie, la chaleur de liens rassurants, ces rencontres qui donnent confiance n’auront pas moins d’importance. Mais elles seront vécues d’une autre façon : elles nous feront revivre, à des moments décisifs, la grâce de cette confiance relationnelle découverte au matin de notre vie.

Yannick Noah a été aimé par ses parents, Zacharie et Marie-Claire. Eux-mêmes très amoureux, ils ont accueilli et choyé le petit Yannick. Ce dernier est âgé de onze ans lorsqu’il rencontre le joueur de tennis Arthur Ashe, alors quatrième mondial, à l’occasion d’une de ses tournées en Afrique et de son passage à Yaoundé, au Cameroun. Il a la chance d’échanger quelques balles avec le champion. Surpris par la qualité du jeu de l’enfant, Arthur Ashe lui offre sa raquette à la fin de la partie. Le lendemain, alors qu’il s’apprête à prendre son avion du retour, il voit débouler le garçonnet essoufflé dans le hall de l’aéroport, tenant entre ses mains un poster du champion. Yannick Noah lui demande de le signer. Arthur Ashe fait plus qu’un autographe, il écrit : « Rendez-vous à Wimbledon ! » Comme Yannick Noah le racontera quelques années plus tard après sa victoire à Roland-Garros, ces quelques mots furent le plus beau des cadeaux. Ils l’ont électrisé, accompagné durablement. Ils lui ont permis de croire en son étoile, l’ont aidé à devenir un tennisman du niveau d’Arthur Ashe.

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Avec Madonna ou Noah, on mesure que la confiance en soi n’exige parfois rien de plus que quelques mots bien sentis d’un maître ou d’un ami. Des mots venant du cœur, qui suffisent alors à donner confiance pour la vie.

Autrui peut aussi nous donner confiance sans grand discours ni mot d’encouragement, mais en nous confiant tout simplement une mission […]

Aristote avait une définition très originale et très juste de l’amitié. Un ami, pour l’auteur de l’Éthique à Nicomaque, c’est quelqu’un qui nous rend meilleurs. À son contact, nous nous sentons bien, nous progressons, devenons plus intelligents ou plus sensibles, nous nous ouvrons à des dimensions du monde ou de nous-mêmes que nous ne connaissions pas. L’ami, précise Aristote, est celui qui nous permet « d’actualiser notre puissance » : grâce à lui, ou plus précisément grâce à la relation que nous avons avec lui, nous développons réellement, « en acte », des talents que nous n’avions que potentiellement, « en puissance ». La relation d’amitié est donc l’occasion de notre développement. L’ami n’a pas besoin d’être animé d’une générosité pure ou de nous écouter nous plaindre pendant des heures. Si la relation que nous avons avec lui est bonne pour nous, pour notre talent, si elle nous permet de progresser, alors il est notre ami : l’ami de la vie en nous. Ainsi compris, notre professeur de piano, de danse ou de dessin, le champion dont on croise la route ou notre supérieur hiérarchique peut être notre ami, à condition bien sûr qu’il nous donne des occasions de nous développer, de progresser.

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Lorsque nous fréquentons un maître en arts martiaux, un coach sportif, un professeur de yoga – autant d’amis possibles au sens d’Aristote –, nous gagnons en confiance en nous, et pas simplement parce que nous acquérons des compétences.

Sensibles à l’attention et à la bienveillance d’un autre, accompagnés par quelqu’un qui nous veut du bien, nous retrouvons notre vérité d’être relationnels. Alors, ce n’est pas tant notre professeur de piano ou notre maître en arts martiaux qui nous donne confiance, mais la relation que nous avons avec lui.

Cette relation se vit au travers de rendez-vous réguliers qui rythment notre progression. Nous sentons, chaque fois, sa satisfaction de nous voir nous améliorer, sa capacité à nous motiver, à nous soutenir lorsque nous rencontrons des difficultés.

Peu à peu, la confiance qui est la sienne devient la nôtre : c’est le mouvement même de la confiance, et la manière proprement humaine d’apprendre.

Un bon maître nous met en confiance en nous faisant répéter les bons gestes, en nous faisant faire nos gammes. Puis il nous invite à passer à l’acte : il nous fait confiance. Quand autrui nous donne confiance, ces deux aspects sont toujours entrelacés.

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[…] Tout parent, tout maître, tout professeur, tout ami au sens d’Aristote, devrait avoir sans cesse à l’esprit cette double manière de donner confiance : d’abord mettre en confiance, ensuite faire confiance. D’abord sécuriser, ensuite « insécuriser » un peu. Nous avons besoin des deux pour oser nous aventurer dans le monde. Et souvent, ces deux dimensions se mêlent dans le regard que les autres portent sur nous : découvrant la confiance dans leurs yeux, nous nous sentons plus forts.

J’en fais souvent l’expérience, en tant que professeur de philosophie ou conférencier. Pris par le flot des mots, par l’enchaînement des digressions, il m’arrive de perdre le fil de mon propos et de frôler la crise de confiance. Le simple fait de voir dans les yeux des élèves ou du public de l’intérêt, de la curiosité, suffit le plus souvent à me faire retomber sur mes pieds. Il m’arrive aussi de trouver obscur un texte de philosophie que je viens de distribuer à mes élèves. Dès que je sens, au travers des questions qu’ils me posent, la confiance qu’ils placent en moi, le texte me semble soudain plus clair. Érik Decamp m’a expliqué qu’il vivait exactement la même expérience : à l’heure de partir en expédition, la confiance que les autres mettent en lui renforce la sienne. Rien d’étonnant à cela chez les animaux relationnels que nous sommes… Nous sommes alors tous les deux comme cet alpiniste amateur qu’Érik Decamp libère en le responsabilisant : de sentir la confiance mise en nous, nous retrouvons « notre » confiance. La confiance est ce cadeau que les autres nous font, et que nous acceptons volontiers. Lorsque mes élèves me posent une question difficile, je leur fais en retour un cadeau analogue : je leur rétorque qu’ils connaissent la réponse. Je leur fais confiance, et cela suffit la plupart du temps à ce que surgisse chez eux, dans les secondes qui suivent, une réponse intéressante.

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On entend parfois dire de certains individus, dans les entreprises, dans les familles, qu’ils manquent de confiance en eux, comme si leur confiance était simplement une affaire entre eux et eux-mêmes… Mais s’ils n’ont été mis en confiance par personne, si personne ne leur a jamais fait confiance, il n’est pas surprenant qu’ils souffrent d’anxiété. On s’étonne parfois qu’ils manquent de confiance en eux malgré leurs compétences. C’est oublier que nous sommes des êtres de relations, non des monades isolées accumulant des compétences.

[…] 

C’est donc un même mouvement qui nous aidera à prendre confiance en nous et à faire confiance aux autres : sortons de chez nous, nouons des relations avec des gens différents et inspirants, choisissons des maîtres ou des amis qui nous grandissent, nous réveillent, nous révèlent. Cherchons les relations qui nous font du bien, qui nous sécurisent et qui nous libèrent. Et souvenons-nous de ce petit garçon de deux ans : il s’approche de l’invité qui vient d’entrer chez lui. Il va vers l’inconnu. Il en a un peu peur, évidemment. Un étranger vient de faire irruption dans sa maison. Mais il y va quand même. Il y va avec sa peur. Il a confiance en lui autant qu’en cet étranger et en ses proches à ses côtés. Cette confiance n’est déterminée ni génétiquement ni biologiquement. Elle a grandi, peu à peu, dans l’entrelacs des liens qui l’ont enveloppé depuis sa naissance et qui l’ont rassuré, à la manière de ces serviettes dont nous enveloppons les nouveau-nés au sortir du bain. Il arrive même que nous frottions un peu énergiquement leur petit corps, comme pour leur rappeler que nous sommes là, que nous prenons soin d’eux, qu’ils ne sont pas seuls. Par ces soins, nous les mettons en confiance. Ils ont avant tout besoin de cela. Plus tard, en les invitant à manger seuls, ou à oser faire leurs premiers pas, nous leur ferons confiance. Personne ne peut, seul, prendre confiance en soi. La confiance en soi est d’abord une histoire d’amour et d’amitié.

Chasta DOUCHARD 

Ambassadrice de PEPA Education Agency