Dominique Batraville: Marcheur de poésie insulaire

Dominique Batraville, né à Port-au-Prince le 20 février 1962, s’érige en maître de la plume et des émotions caribéennes. Dès ses quinze ans, il se déclare poète, amorçant un parcours atypique entre les bancs du Petit Séminaire Collège St Martial et les horizons littéraires européens.

Après des études éclair à l’Université Libre de Bruxelles et à l’Université de Lille, Batraville retourne en Haïti en 1986, porté par le vent du changement à la chute de Jean-Claude Duvalier. Son écriture, façonnée par les espaces insulaires et les mondes créoles, s’entrelace intimement avec le voyage, l’utopie insulaire et l’intention sacrée.

Le poète-marcheur explore les frontières du “réalisme merveilleux” de Jacques Stephen Alexis, s’aventure dans l’univers tourmenté de Kafka, et danse avec les fables homériques de Juan Rulfo. Son engagement en tant qu’anarchiste discret se dessine dans l’absurde, la folie, le comique, et la lumière joyeuse de son île natale.

Attaché au bouddhisme, au vodou, et au calvinisme, Batraville use de ces “matières premières” pour tisser ses récits. Lauréat du Prix Sony Rupaire en 1998 pour son conte “Potre van nan sèvolan lakansyèl”, il s’exporte en portugais et en espagnol, témoignant de l’universalité de son talent.

Critique littéraire pour Le Nouvelliste depuis 1988, ses articles s’étendent à travers les journaux haïtiens, les Antilles françaises, l’Amérique du Nord et l’Europe. Son double artistique, comédien de cinéma, brille dans des films belges, français, et suisses.

En 2012, il dévoile “L’Archipel des hommes sans os”, un recueil de nouvelles imprégnées d’imaginaire caribéen. Les personnages y évoluent dans un monde à la croisée du réalisme merveilleux de Jacques Stephen Alexis et du rythme tourmenté de Julio Cortázar.

“L’Ange de charbon” (2014), son dernier ouvrage, replonge dans le séisme haïtien, explorant les mésaventures de M’Badjo Baldini. Cette extravagante fable vodou, mélange d’érotisme et de dérision caribéenne, célèbre la résilience face à la catastrophe.

Dominique Batraville, ce Maldoror noir, clôture ainsi son œuvre avec un rire éclatant, offrant une ultime réplique au séisme ravageur. Un homme qui, par le verbe, surmonte les douleurs de son île, laissant une empreinte indélébile dans la littérature créole et au-delà.

Éduca-Plumes